L'identité numérique temporelle et systémique
La réflexion qui suit émerge depuis quelques temps déjà au travers de ce que je vis, lis et interagis sur le net !
Yann Le Guennec m'a interpellée avec son commentaire d'une grande pertinence sur l'identité numérique :
"nous avons à faire à 2 modèles de représentation de l’identité numérique. Le premier modèle est une structure hiérarchique, une étoile centrée sur l’individu et son identité disons, socio-administrative. C’est dans ce modèle que je positionne cette typologie: http://www.internetactu.net/2008/02/01/le-design-de-la-visibilite-un-essai-de-typologie-du-web-20/ . Dans cette typologie, la simulation par exemple n’est simulation que par référence à un soi vu comme réel, la simulation est notée comme du domaine de la projection, nécessairement projeté à partir d’un réel de référence.
Le second modèle est un réseau non hiérarchique d’entités diverses et variées qui ont toutes une forme de réalité, qu’elle soit numérique, biologique, etc… Le réseau composé de ces entités en interactions est l’identité numérique. Cette dernière dépasse donc l’individu en tant que tel, elle est dispersée, fluctuante et seulement *éventuellement* liée à un individu de référence. On peut aussi aisément supposer qu’elle puisse être reliée à plusieurs individus (identité numérique d’un collectif) . C’est dans les divergences et les convergences entre ces 2 modèles que se situe sans doute notre débat."
Olivier Auber évoque aussi ici une approche complexe de l'identité numérique
"Dès lors qu'il aura repris le contrôle de son identité et de son réseau, le dividu , à savoir l’homme fractionné en - citoyen - électeur - usager - client, etc. ne sera plus rien de tout cela. L'identité publique deviendra complexe et inaccessible à l'image de l'identité réelle. Tout sondage deviendra vain. Toute quantification impossible à l'insu du quantifié. Toute tentative de vision surplombante en dira plus sur les intentions de l'observateur que sur la chose observée".
Et puis il y a cette citation d'Amin Maalouf (via fil twitter artxtra)qui met l'accent sur la construction continue de l'identité numérique "L’identité n’est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme tout au long de l’existence."
Il me semble que l'ensemble de ces dimensions converge vers l'idée d'un identité numérique complexe, fluide et fortement imbriquée dans des dimensions de temporalité et de contextes !
Essayons de synthétiser et d'approfondir ce champs de réflexion :
L’approche classique consiste a se représenter l’identité numérique comme un réseau centripète, organisé autour d’une identité référente, miroir de notre « soi » vécu comme réel !
Selon cette approche par exemple, la simulation dans un environnement virtuel ou les traces que nous laissons ici et là sur le net relèvent du domaine de la projection de soi.
A noter que cette projection de soi s’inscrit dans une intention et une stratégie de visibilité au travers de différents processus de catégorisations/représentations actives et déclaratives !
C’est ce que nous pourrions appeler une forme d’identité socio-administrative de type déclarative et symbolique.
L’autre approche consiste à se représenter l’identité numérique comme un réseau non hiérarchique et acentré d’identités diverses et variées qui ont toute une forme de réalité (numérique, biologique …).
Dans cette approche, l’identité numérique émerge de la mise en résonnance de ces différentes entités…
Nous pourrions ainsi la définir comme une identité Numérique Connective de type émergente et cette fois-ci subsymbolique ! Les robots numériques façonnent en partie son déterminisme et parfois aussi ses dérives [ cf rationalisation du vivant - algorithmes de recherche - détournements des graphes - Noloops - liens MAJ le 07-02-2021]
Ces deux approches configurent un système de processus auto-organisationnels : l’équilibrage qui en résulte à l’instant « t » détermine l’identité numérique temporelle !
Il est clair que cette approche remet en question la prétention à la maitrise totale de l'identité numérique...Cette identité numérique reste le reflet de notre humanité et de notre intelligence à en conscientiser la Complexité tout au long de la vie...et c'est très bien ainsi ! :-)
Cette réflexion est à mettre en résonance avec la vision énactive de Francisco Varela : Varela voit la catégorisation comme un processus dynamique et re-questionable puisque son socle s'inscrit dans l'émergence. Il fait l'hypothèse que les catégorisations arrivent comme description de ce qui émerge et non comme détermination préalable. Varela écrit notamment que l’émergence subsymbolique et la computation symbolique sont reliées dans une relation de complémentarité (l’une ascendante et l’autre descendante), dans un mode mixte ou encore utilisées à des niveaux ou des stades différents. Pour lui, "la relation la plus intéressante entre l’émergence subsymbolique et la computation symbolique est une relation d’inclusion : nous voyons les symboles comme une description de niveau supérieur de propriétés qui se trouvent, en dernière instance, enracinées dans un système distribué sous-jacent » " [L'inscription corporelle de l'esprit - F Varela - Seuil - 1993 - p. 149] (MAJ du 14 juillet 2013 : le travail de Stanislas Dehaene sur les mécanismes Bayésiens de l'induction semble le confirmer [ URL devenue obsolète http://www.college-de-france.fr/documents/audio/dehaene/2011-2012/Cours/dehaene-20120117.mp3 - nouveau lien https://www.college-de-france.fr/site/stanislas-dehaene/course-2012-01-17-09h30.htm ]...à partir du moment où les deux niveaux subsymboliques et symboliques sont couplés autour d'une relation dynamique. il en découle, en quelque sorte, une forme d'ontologie évolutive...
Dans le cadre de l'identité numérique cette ontologie évolutive prend la forme d'un système qui s'équilibre dans le temps ; c'est l'identité numérique temporelle !
D'une certaine manière cette réflexion nous conduit a appréhender l’identité numérique sous l'angle d'un équilibrage permanent entre identité numérique active de type projective et identité numérique passive de type dissociée, émergente et contextuelle !
Cliquer sur l'image pour l'agrandir :
A lire en parallèle (liste remise à jour le 7 février 2021)
- Individuation et méta-formes http://florencemeichel.blogspot.com/2011/04/individuation-et-meta-formes.html
- L’identité, la part de l’autre http://www.implications-philosophiques.org/actualite/recension-l%E2%80%99identite-la-part-de-l%E2%80%99autre/
- Les amis de mes amis http://jeancletmartin.blog.fr/2010/11/12/les-amis-de-mes-amis-9961749/
- Rationalisation du vivant
Yann Le Guennec m'a interpellée avec son commentaire d'une grande pertinence sur l'identité numérique :
"nous avons à faire à 2 modèles de représentation de l’identité numérique. Le premier modèle est une structure hiérarchique, une étoile centrée sur l’individu et son identité disons, socio-administrative. C’est dans ce modèle que je positionne cette typologie: http://www.internetactu.net/2008/02/01/le-design-de-la-visibilite-un-essai-de-typologie-du-web-20/ . Dans cette typologie, la simulation par exemple n’est simulation que par référence à un soi vu comme réel, la simulation est notée comme du domaine de la projection, nécessairement projeté à partir d’un réel de référence.
Le second modèle est un réseau non hiérarchique d’entités diverses et variées qui ont toutes une forme de réalité, qu’elle soit numérique, biologique, etc… Le réseau composé de ces entités en interactions est l’identité numérique. Cette dernière dépasse donc l’individu en tant que tel, elle est dispersée, fluctuante et seulement *éventuellement* liée à un individu de référence. On peut aussi aisément supposer qu’elle puisse être reliée à plusieurs individus (identité numérique d’un collectif) . C’est dans les divergences et les convergences entre ces 2 modèles que se situe sans doute notre débat."
Olivier Auber évoque aussi ici une approche complexe de l'identité numérique
"Dès lors qu'il aura repris le contrôle de son identité et de son réseau, le dividu , à savoir l’homme fractionné en - citoyen - électeur - usager - client, etc. ne sera plus rien de tout cela. L'identité publique deviendra complexe et inaccessible à l'image de l'identité réelle. Tout sondage deviendra vain. Toute quantification impossible à l'insu du quantifié. Toute tentative de vision surplombante en dira plus sur les intentions de l'observateur que sur la chose observée".
Et puis il y a cette citation d'Amin Maalouf (via fil twitter artxtra)qui met l'accent sur la construction continue de l'identité numérique "L’identité n’est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme tout au long de l’existence."
Il me semble que l'ensemble de ces dimensions converge vers l'idée d'un identité numérique complexe, fluide et fortement imbriquée dans des dimensions de temporalité et de contextes !
Essayons de synthétiser et d'approfondir ce champs de réflexion :
L’approche classique consiste a se représenter l’identité numérique comme un réseau centripète, organisé autour d’une identité référente, miroir de notre « soi » vécu comme réel !
Selon cette approche par exemple, la simulation dans un environnement virtuel ou les traces que nous laissons ici et là sur le net relèvent du domaine de la projection de soi.
A noter que cette projection de soi s’inscrit dans une intention et une stratégie de visibilité au travers de différents processus de catégorisations/représentations actives et déclaratives !
C’est ce que nous pourrions appeler une forme d’identité socio-administrative de type déclarative et symbolique.
L’autre approche consiste à se représenter l’identité numérique comme un réseau non hiérarchique et acentré d’identités diverses et variées qui ont toute une forme de réalité (numérique, biologique …).
Dans cette approche, l’identité numérique émerge de la mise en résonnance de ces différentes entités…
Nous pourrions ainsi la définir comme une identité Numérique Connective de type émergente et cette fois-ci subsymbolique ! Les robots numériques façonnent en partie son déterminisme et parfois aussi ses dérives [ cf rationalisation du vivant - algorithmes de recherche - détournements des graphes - Noloops - liens MAJ le 07-02-2021]
Ces deux approches configurent un système de processus auto-organisationnels : l’équilibrage qui en résulte à l’instant « t » détermine l’identité numérique temporelle !
Il est clair que cette approche remet en question la prétention à la maitrise totale de l'identité numérique...Cette identité numérique reste le reflet de notre humanité et de notre intelligence à en conscientiser la Complexité tout au long de la vie...et c'est très bien ainsi ! :-)
Cette réflexion est à mettre en résonance avec la vision énactive de Francisco Varela : Varela voit la catégorisation comme un processus dynamique et re-questionable puisque son socle s'inscrit dans l'émergence. Il fait l'hypothèse que les catégorisations arrivent comme description de ce qui émerge et non comme détermination préalable. Varela écrit notamment que l’émergence subsymbolique et la computation symbolique sont reliées dans une relation de complémentarité (l’une ascendante et l’autre descendante), dans un mode mixte ou encore utilisées à des niveaux ou des stades différents. Pour lui, "la relation la plus intéressante entre l’émergence subsymbolique et la computation symbolique est une relation d’inclusion : nous voyons les symboles comme une description de niveau supérieur de propriétés qui se trouvent, en dernière instance, enracinées dans un système distribué sous-jacent » " [L'inscription corporelle de l'esprit - F Varela - Seuil - 1993 - p. 149] (MAJ du 14 juillet 2013 : le travail de Stanislas Dehaene sur les mécanismes Bayésiens de l'induction semble le confirmer [ URL devenue obsolète http://www.college-de-france.fr/documents/audio/dehaene/2011-2012/Cours/dehaene-20120117.mp3 - nouveau lien https://www.college-de-france.fr/site/stanislas-dehaene/course-2012-01-17-09h30.htm ]...à partir du moment où les deux niveaux subsymboliques et symboliques sont couplés autour d'une relation dynamique. il en découle, en quelque sorte, une forme d'ontologie évolutive...
Dans le cadre de l'identité numérique cette ontologie évolutive prend la forme d'un système qui s'équilibre dans le temps ; c'est l'identité numérique temporelle !
D'une certaine manière cette réflexion nous conduit a appréhender l’identité numérique sous l'angle d'un équilibrage permanent entre identité numérique active de type projective et identité numérique passive de type dissociée, émergente et contextuelle !
Cliquer sur l'image pour l'agrandir :
A lire en parallèle (liste remise à jour le 7 février 2021)
- Individuation et méta-formes http://florencemeichel.blogspot.com/2011/04/individuation-et-meta-formes.html
- L’identité, la part de l’autre http://www.implications-philosophiques.org/actualite/recension-l%E2%80%99identite-la-part-de-l%E2%80%99autre/
- Les amis de mes amis http://jeancletmartin.blog.fr/2010/11/12/les-amis-de-mes-amis-9961749/
- Rationalisation du vivant
https://florencemeichelpointsdevue.reseauxapprenants.com/2009/01/rationalisation-du-vivant.html
- Apprendre2.0 et Google search
- Mathématiques appliquées et questionnement philosophique
- Noloops et 7ième sens
https://florencemeichelpointsdevue.reseauxapprenants.com/2016/05/noloops-et-7ieme-sens.html
MAJ du 5 septembre 2011 : il semblerait que des sociétés comme Facebook et Google ambitionnent de court-circuiter et d'orienter le processus identitaire au travers de sa dimension mémorielle et symbolique :
- Total recall. Silico transit memoria mundi http://affordance.typepad.com/mon_weblog/2011/09/total-recall.html "L'identité numérique n'est que le pot de miel sur lequel se concentrent pour l'instant les techno-marketeurs. Google, Facebook et les autres ont déjà le regard tourné vers les conditions d'existence de la ruche, vers l'analyse des interactions des abeilles. Ils ont compris depuis longtemps que le contrôle de l'engrammation, de ce qui "fait mémoire", constituera pour eux la prochaine clé de leur suprématie, et donc de leur survie."
- Apprendre2.0 et google search http://blogveilleflorencemeichel.blogspot.com/2011/03/apprendre20-et-google-search.html
==> Corollaire : sans citoyens émancipés, pas de démocratie ! http://florencemeichel.blogspot.co.uk/2010/05/sans-citoyens-emancipes-pas-de.html
MAJ du 14 octobre 2013 : Heinz Von Foerster avait tout compris - Données et éthique http://florencemeichel.blogspot.com/2013/03/donnees-et-ethique.html
MAJ du 5 septembre 2011 : il semblerait que des sociétés comme Facebook et Google ambitionnent de court-circuiter et d'orienter le processus identitaire au travers de sa dimension mémorielle et symbolique :
- Total recall. Silico transit memoria mundi http://affordance.typepad.com/mon_weblog/2011/09/total-recall.html "L'identité numérique n'est que le pot de miel sur lequel se concentrent pour l'instant les techno-marketeurs. Google, Facebook et les autres ont déjà le regard tourné vers les conditions d'existence de la ruche, vers l'analyse des interactions des abeilles. Ils ont compris depuis longtemps que le contrôle de l'engrammation, de ce qui "fait mémoire", constituera pour eux la prochaine clé de leur suprématie, et donc de leur survie."
- Apprendre2.0 et google search http://blogveilleflorencemeichel.blogspot.com/2011/03/apprendre20-et-google-search.html
==> Corollaire : sans citoyens émancipés, pas de démocratie ! http://florencemeichel.blogspot.co.uk/2010/05/sans-citoyens-emancipes-pas-de.html
MAJ du 14 octobre 2013 : Heinz Von Foerster avait tout compris - Données et éthique http://florencemeichel.blogspot.com/2013/03/donnees-et-ethique.html
Commentaires
Et si on regardait les choses avec plus de simplicités.
Ceux qui utilisent des pseudos oseraient-ils écrire, parler, se connecter avec autant de facilité que caché derrière le masque de Zorro ? Une forme aussi de dénie de sa propre personne et personnalité qui permet de vivre "une autre vie" par procuration et au travers d'un "autre soi"... Allo, docteur, je voudrais un rendez-vous pour une analyse. Pas étonnant que les psy (en tout genre et autres gurus) soient tous inscrits au fichier de l'Impôt Sur la Fortune.
Et notre monde nous incite guère à "assumer" nos actes...
Soyons simples, réalistes et assumons.
Une simple analogie pour montrer que c'est compliqué (malheureusement):
Il y a quelques années, l'un de mes amis artiste a fait l'expérience suivante:
- prendre quelques grenouilles.
- les disposer dans un joli bac rempli d'eau avec des nénuphars et tout ce qu'il faut pour qu'elles soient heureuses.
- disposer au dessus du bac une boîte opaque comprenant des lumières artificielles mimant le rythme du jour et de la nuit.
- enregistrer en permanence les croassements et les rediffuser avec un certain délai ajustable.
Résultat: les grenouilles pètent les plombs. Au bout d'un moment elles ne savent visiblement plus qui elles sont!
Le web, c'est pareil. Nous sommes tous à la fois artistes et grenouilles ;-)
L'ami c'est Erik Samakh: http://stephan.barron.free.fr/technoromantisme/samakh.html
Le "non soi" étant influencé par le "soi" et réciproquement (comme sur ta balance).
Par ailleurs les catactéristiques ou qualités qui déterminent aussi l'individu "flux" sont aussi des "flux" qu'on ne devrait donc pas considérer comme étant des notions permanentes...
mais qu'est-ce qui est soi et qu'est-ce qui ne l'est pas...Miguel beanasayag emploie une expression que j'aime bien : " je ne suis qu'un pli de l'etendue " :-)